3 – Sortie de système
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Dans les deux précédents chapitres, j’ai abordé d’une part la nécessité de réaliser un alignement entre ce qui est bon pour nous, pour notre organisation et pour la planète, et d’autre part le croisement de deux systèmes, un peu de la manière dont deux ascenseurs vont dans des directions opposées : l’un descend (le système en place) alors que l’autre monte (le système émergent).
J e vais maintenant aborder comment se passe la sortie du système et où les gens se positionnent en regard de ces deux ascenseurs, de ces deux courbes. Ce qui suit est volontairement d’ordre général, je vous recommande donc de faire autant de connections que possible avec votre propre réalité et les opportunités que cela apporte.
La place que nous occupons vis à vis des systèmes en présence est déterminée par là où nous portons notre attention. Notre réalité est donc définie par ce à quoi nous faisons attention. Je traiterai de ces aspects cognitifs dans un prochain chapitre,.
Dans le chapitre précédent, j’ai décrit comment le système en place ne sait plus gérer sa propre complexité et se retrouve donc plongé dans le chaos. Dans sa fuite en avant, et pour assurer sa survie, ce système exige une attention complète de notre part. Nous voyons quotidiennement à quel point notre attention et notre temps sont étirés au-delà des limites du raisonnable avec les conséquences individuelles et collectives que cela emporte.
Chaque fois que nous nous écartons des exigences de ce système, il nous rappelle à l’ordre et ne manquera nous faire payer nos escapades. Notre vie quotidienne est peuplée de rites d’obédience.
De manière schématique, il y a deux lieux qui déterminent notre position par rapport au système: dedans ou pas. Lorsque l’on n’est “pas dedans”, on est alors “dehors” ou “à coté”. Voyons cela plus en détail.
Position 1 – Dedans
“Dedans”, les gens sont encore, volontairement ou non, accrochés au système. Cette position est la plus confortable car l’histoire justifie l’inertie du système, c’est à dire sa tendance à conserver sa direction et sa vitesse. Elle est aussi bien sûr la plus dangereuse, car elle nous condamne à suivre la trajectoire de ce système.
Si on ajoute la peur du changement, de l’inconnu, du vide et de l’échec qui sont souvent nourris par les messages diffusés par les grands médias, la tentation de regarder en dehors du système en place, voire d’imaginer qu’il puisse exister un “ailleurs” peut être réduite à zéro. Les justifications pour rester accrochés au passé sont innombrables.
Dedans, il y a toutes sortes de postures. Je vais en isoler trois types principaux, sachant que de telles catégories sont limitantes et que nous pouvons passer, suivant les circonstances, par l’une ou l’autre. Quelqu’elles soient, les perspectives qui entraînent ces positions sont légitimes car elles sont liées à ce que les gens perçoivent, ce qu’ils peuvent et veulent voir.
Dans la première position, les gens croient au système et le défendent. Certains le défendent au point qu’ils sont prêts à pousser le système dans ses extrêmes pour le remettre sur les rails. Ils sont bien conscients qu’il y a des problèmes, mais leur confiance dans la structure leur fait espérer que des solutions seront trouvées. Il est fréquent que cette posture se traduise par diverses formes d’enracinement, de blocage et de tentatives de rationalisation.
La deuxième posture est celle du doute. Les personnes qui sont dans cette catégorie sont assez proches de la première, à la grande différence qu’elles ont commencé à ne plus croire que le système en place pourra finir par trouver les solutions nécessaires. Ce doute commence souvent par une constatation personnelle avant d’être exprimé et partagé publiquement. Je vais revenir plus bas sur le processus de passage vers lequel cette posture amène.
La troisième et dernière position est celle de la rebellion interne. Que cela soit à titre personnel ou collectif, celles et ceux qui s’y retrouvent voient clairement l’incapacité du système à faire face à ses challenges et en éprouvent la violence. Elles manifestent leur frustration et leur colère. Elles demandent des comptes et des réponses et exigent des changements. C’est une position difficile, car les moyens “traditionnels” de la tentative de dialogue à la manifestation demandent d’énormes efforts qui ne sont, le plus souvent, pas récompensés.
De plus, ces personnes risquent de se retrouver catégoriser de manière négative : le système les affubles facilement de multiples étiquettes dégradantes. Il est facile pour les structures en place d’associer une personne dans cette position à toutes sortes de courants de pensée qui n’ont rien à voir avec là où la personne se situe. Il faut une bonne dose de courage pour tenir dans cette posture. D’une certaine manière, cette troisième position est comme le “canari dans la mine”, sachant que les “mineurs” font tout ce qu’ils peuvent pour ne pas les entendre et réprimer les cris d’alarme.
Encore une fois, ces catégories ne sont pas exclusives et il en existe de multiples variations. De même, suivant les types de situation, un personne pourra se retrouver dans l’une ou l’autre de ces postures.
Position 2 – Dehors, ailleurs
Il s’agit ici de gens qui sont sortis du système en place, au moins “dans la tête”. Elles s’affairent à construire et faire croître des projets qui sont par définition en marge du système. Ces personnes sont dans l’action. Le plus souvent, il s’agit de projets très localisés mais qui touchent tous les domaines : éducation, agriculture, social, recherche et nouvelles technologies. Il existe littéralement des millions de projets de cet ordre sur l’ensemble de la planète et leur validité ainsi que leur efficacité réele ou potentielles deviendront évidentes lorsque nous aborderons la notion de fractales dans de prochains chapitres.
Mais contrairement à ce que le système en place aime à penser, les personnes qui travaillent sur ces projets ne sont pas une bande de hippies à la sauce du vingt-et-unième siècle qui sont partis se réfugier au fond d’une campagne. Ni leur apparence, ni leur comportement ne permettent de les reconnaître. Ce sont leurs actions qui les différentient. Ces personnes œuvrent, chacune à leur manière et avec tous les succès et les échecs qu’emporte une telle démarche, à la mise en place d’un monde plus viable.
Il est important de noter que le nombre des gens qui consacrent une partie ou la totalité de leur temps à ces projets est en accélération constante. Il est probable qu’il y a dix ans, vous n’en connaissiez pas un, même de réputation. Aujourd’hui vous en connaissez probablement plusieurs personnellement et peut-être en faites vous-même déjà partie.
Position 3 – Dehors, à coté
Entre “dedans” et “ailleurs” se trouvent les passeurs. Être “à côté” du système permet de fonctionner avec lui, mais en étant, sinon physiquement, au moins cognitivement et psychologiquement protégé. La sécurité cognitive permet de considérer le système en place comme un objet extérieur, dont on ne fait plus partie. La sécurité psychologique est essentielle car elle débarrasse des peurs qui peuplent le système en place et contribuent à en assurer la continuité. Extérioriser le système en place, c’est à dire être capable de le considérer comme un objet hors de nous et non pas en nous, donne l’opportunité de ne pas subir tout ce qu’il subit, de ne pas ressentir tout ce qu’il ressent.
Les passeurs sont en mesure de comprendre les difficultés du système sans les juger avec une sévérité excessive. Ils sont aussi clairs sur la nécessité et le potentiel de l’ “ailleurs” que je viens de décrire. Ces passeurs contribuent à illuminer le potentiel des systèmes émergents et nous allons voir dans les prochains chapitres comment ils affutent leur posture et leur communication pour participer aux changements individuels et collectifs.
Dans le premier chapitre, j’ai fait référence à la grenouille dans la casserole, un archétype systémique dans lequel la pauvre bête se retrouve cuite sans avoir pu s’en rendre compte car la température est montée insensiblement. La capacité d’une espèce (donc d’un système) à survivre dans son environnement est liée à sa capacité à s’adapter aux changements de cet environnement. Lorsque l’environnement change (dans le cas présent, se dégrade) au-delà d’un certain seuil et/ou d’une certaine vitesse, l’espèce ne peut plus s’adapter et disparaît.
Par environnement, il faut entendre ici non seulement l’environnement physique mais aussi organisationnel, et donc les aspects politiques, économiques et sociaux. Ce qui me paraît encore plus essentiel, c’est l’environnement cognitif : la manière dont nous traitons les informations qui sont à notre disposition.
Les dernières décennies montrent que notre réalité est de plus en plus faite de chaos. Comme personne n’est attiré par le chaos, il est facile d’aller chercher du réconfort dans ce qui existe déjà, même si ce n’est pas idéal. Chercher la réassurance dans un système chaotique nous plonge aussi dans le chaos. La solution est évidente : il faut sauter hors de la casserole. Mais encore faut-il avoir conscience que l’on est dans une casserole, que sa température monte et qu’il est possible de sauter au dehors.
L’inconscience ou le déni de ces possibilités sont inacceptables, car ils nous mènent directement à des situations tragiques, ils sont cependant compréhensibles. À titre personnel, il est utile de comprendre comment nous décidons le changement. Ici, celui-ci vient de l’intérieur, de nous-même, pas d’un événement extérieur comme Elisabeth Kübler-Ross le décrit par exemple dans la courbe du deuil.
Reconnaître : point de bascule
Une expression américaine dit que les gens changent soit par ce qu’ils sont inspirés soit parce qu’ils sont désespérés (people change out of inspiration or desperation). L’inspiration vient le plus souvent de l’extérieur. On pourra penser par exemple à des leaders charismatiques. Si je me réfère à cet exemple, celles et ceux qui bénéficient à l’heure actuelle d’une large audience parlent en majorité de “bricolage” du système en place. Très peu ouvrent vers des horizons émergents. Enfin, ceux qui le font sont mécaniquement en but aux critiques et à des campagnes de désinformation et de dénigrement.
Heureusement, l’inspiration venant de l’extérieur peut aussi s’acquérir en se cultivant, en lisant, en allant vers des sources d’informations et de connaissances qui passent “sous le radar” du système en place.
L’inspiration est alors internalisée. Elle vient de l’intérieur. Les personnes qui ont la chance ou qui on fait l’effort d’aller sur cette voie deviennent alors des leaders, tout en profitant du fait qu’elles sont, une fois de plus, “sous le radar”.
Le désespoir suit un chemin différent. Comme nous allons le voir plus bas, la pluspart de celles et ceux qui changent pour cette raison n’y pensaient probablement presque pas six mois avant. Très souvent, ces personnes avaient trouvé un (in)confort acceptable dans le système en place. Il était clair que ce système n’apportait pas de véritables solutions, mais bon, il était là et proposait diverses formes de réassurance auxquelles on avait choisi de croire. La confiance tenait encore.
Pour ces personnes, le changement s’est fait de la manière dont un sablier se renverse. Chaque grain qui s’écoule est un doute, une déception, une frustration, une promesse non tenue, un objectif de plus non atteint, une crise supplémentaire non gérée. Et lorsque l’écoulement commence, vient un moment il n’est plus possible de l’arrêter. Survient alors le moment de la bascule.
À cet instant précis, il devient évident que le système en place ne pourra pas résoudre les problèmes qui lui sont posés. C’est le moment où, tout naturellement, on commence à regarder “ailleurs”. L’urgence ouvre la porte aux opportunités.
Cette bascule se produit un cerveau à la fois. Mais lorsqu’il est porteur d’espoir, le changement est contagieux. S’il n’y a plus rien où presque à espérer du changement en place et si les phénomènes émergents donnent des signes de viabilité et de vitalité, la polarité devient évidente. Or les gens parlent, parfois à voix basse et à mots couverts, mais ils parlent, ce qui contribue à l’exponentielle du changement. Je consacrerai tout un chapitre aux exponentielles, mais disons déjà qu’à son début, la courbe est pratiquement plate, donc indécelable. Regardons maintenant cette bascule dans le détail. Cela sera utile pour vous-même aussi bien que pour votre entourage.
La première phase du changement décidé consiste à “reconnaître” que le changement est nécessaire. Ce n’est pas qu’un processus mental. Beaucoup de gens savent qu’ils doivent arrêter de fumer ou faire du sport. Mais la tête, le mental, ne suffit pas.
Reconnaître se fait avec tout notre être. Le moment de la reconnaissance prend quelques secondes. Ces secondes font éclater l’évidence : la situation actuelle est inacceptable et il faut changer. Pour parvenir à ce point où la réalité s’impose à nous, il faut avoir pris le temps nécessaire pour accumuler suffisamment d’informations qui montrent l’impossibilité de rester dans l’état présent. Je viens d’évoquer un sablier, vous pourrez aussi penser à une balance à plateaux : à un moment, le poids des informations fait basculer la balance.
Ce processus nécessite donc de prendre en compte les signaux extérieurs. Mais vous comprendrez bien que la grenouille dont j’ai parlé auparavant n’est pas nécessairement intéressée par ces signaux, surtout lorsqu’elle est prisonnière d’un système-casserole (et je ne me risquerai pas à envisager qu’il puisse y avoir un couvercle sur la casserole).
Au même titre que la captivation de l’attention, l’activité débridée est aussi un excellent moyen pour cacher l’inertie. Au pire, pour ceux qui sont bloqués dans cette première position, à l’intérieur du système, même si l’inconfort est extrême, il n’y a pas de reconnaissance, donc pas de désir de changer.
Accepter : vers l’autonomie
La reconnaissance mène à la deuxième phase, l’acceptation. Une fois que l’on a reconnu la nécessité de changer, les choses sérieuses commencent. En effet, n’étant plus autant accroché au système en place, on sort cognitivement de son emprise et on arrive au deuxième point, entre les deux courbes. Mais ce n’est pas aussi simple que de franchir une porte.
En effet, notre environnement est encore occupé dans sa quasi-totalité par l’ancien système. Son emprise est très puissante, et il est important de savoir garder la tête froide. Cela signifie par exemple que nous devons garder à l’esprit que ce qui nous entoure, n’est pas “la” réalité, mais “une” réalité. Tout en évoluant dans cette réalité, nous devenons capable d’en envisager d’autres. Cette phase d’acceptation amène vers l’autonomie.
Encore une fois, un claquement de doigt ne suffira pas. Symboliquement, c’est la traversée du désert. On sait d’où on vient et où on ne peut plus être, mais on ne sait pas encore clairement là où on veut être et comment y parvenir. C’est donc une période d’incertitudes et il y a des pièges.
L’autonomie se construit. Pendant cette traversée du désert, il faut faire attention à ne pas être isolé. En même temps, il faut être attentif aux personnes que l’on fréquente. Par exemple, il n’est pas utile de passer trop de temps à parler de votre cheminement avec les personnes qui sont décidément accrochées au système en place et veulent que tout le monde “y reste”. J’y reviendrai dans le chapitre sur les aspects cognitifs, mais disons déjà qu’une des excuses pour rester bloqué dans le système en place est de faire l’inventaire des tentatives qui ont échouées.
À l’inverse il est bon de partager vos expériences et vos ressentis (vos doutes, vos joies, vos victoires, vos peurs) avec ceux qui sont suivent la même démarche. Le challenge ici est de savoir à qui faire confiance et sur quels sujets. Cette démarche contribue au développement personnel de chacun. L’autonomisation est se produit au plan individuel avant de devenir collective. Les expériences et tentatives se font de plus en plus à plusieurs et, comme dans la nature, celles qui marchent sont reproduites et étendues. À terme, cela conduit à des convergences qui déclenchent une mobilisation.
Dans tous les cas, il est important de se souvenir que chacun à droit à son opinion et que telle ou telle opinion ne doit donner lieu à quelque forme de catégorisation que ce soit, dans un sens comme dans l’autre. La nature humaine est bien plus complexe qu’une opinion ou une autre.
En passant “dehors,” il y a un autre un piège que j’appellerai le cocooning. On « en » est sorti, mais on ne veut pas « y » aller. C’est donc comme si on recréait une matrice qui n’est plus dysfonctionnelle, mais illusoire. Il est nécessaire de prendre soin de soi et d’avoir des moments de confort. Mais cela ne doit pas être une excuse pour partager sans arrêt des “textes inspirants” ou des vidéos qui nous font du bien ou nous confirment dans nos croyances, avec d’autres qui sont tout autant déconnectés de la réalité. La phase d’autonomisation est une phase active. Ce n’est pas une bonne idée de patiner sur place.
Comme cette phase est active, et je l’avais déjà indiqué dans le précédent chapitre, elle est largement consacrée à l’expérimentation. Comment savoir ce qui fonctionne si l’on n’essaye pas ? Cela nécessite de la persistance et beaucoup de créativité. Il faut donc savoir prendre des risques, y compris vis à vis de nos systèmes de croyance. Peut-être que tout n’est pas si impossible que ça, que les choses ne font pas forcément dans l’effort, qu’il est possible de s’amuser et d’avoir du plaisir en contribuant à l’émergence d’un nouveau paradigme, etc.
Les premiers risques, qui sont aussi les premiers signaux tangibles et positifs que l’on sort du système en place, sont de poser des questions sur le sens de ce que l’on fait (j’ai déjà parlé du sens et j’y reviendrai à plusieurs reprises) et de partager ce que l’on voit, sans jugement, mais en posant notre réalité et en prenant notre place et notre responsabilité.
Il y a une différence entre prendre des risques et se mettre en danger. Sachez discerner où et quand prendre un risque devient une mise en danger et inversement. L’autonomisation affute les sens.
Plus loin : dépasser
En ce qui concerne la créativité, c’est un cadeau qu’il faut savoir accepter et gérer. Par accepter, il faut arrêter ces excuses automatiques du genre “je ne suis pas créatif” qui consistent juste à fermer la porte sur son potentiel pour des raisons qui sont le plus souvent extérieures et oubliées depuis longtemps. Gérer sa créativité, c’est un peu comme gérer un geyser. On ne sait pas forcément quand elle va surgir.
Le chanteur américain Tom Waits raconte qu’un jour alors qu’il conduisait sur une autoroute à Los Angeles il a été soudainement, comme il le dit : “visité par sa muse” avec des idées de créations magnifiques. Tout seul au volant de sa voiture, incapable de prendre des notes, il s’est exclamé à voix haute : “Vous ne voyez pas que je suis en train de conduire là ? Revenez tout à l’heure et attendez que je me serai garé.” La sortie du système en place ouvre des horizons nouveaux et des possibilités multiples et il est important de savoir surfer cette vague de créativité avec un minimum de sérénité.
J’ai donc évoqué, entre le système en fin de vie dans lequel il faut continuer à évoluer mais auquel on appartient plus, et le système émergent porteur du futur. Les enjeux et les risques sont considérables, mais avons-nous le choix ? Oui, bien sûr nous avons le choix. Dire qu’on n’a pas le choix, c’est un choix. Et choisir d’aller mieux est un choix magnifique, mais pas aussi simple qu’il n’y paraît.
Nos actions doivent mener vers la courbe du ascendante et l’alimenter. Il ne s’agit pas d’un souhait ou d’un programme. C’est une description, faite depuis un point en dehors du système en place, de ce qui est en cours. A partir de maintenant, je vais nous placer dans cette position à coté du système.
C’est la position des poseurs de passerelle, des passeurs, de ceux qui illuminent le potentiel des systèmes émergents. Nous sommes prêts pour envisager le rôle à tenir lorsque nous nous retrouvons entre ces deux courbes. C’est ce que nous verrons dans l’article suivant.
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Pour aller plus loin :
– Sur Elisabeth Kübler-Ross : la psychiatre suisse-américaine a développé à la fin des années 60 un modèle décrivant les phases de deuil à la suite de l’annonce d’un diagnostic de maladie terminale. Ce modèle, très connu et utilisé dans toutes sortes de domaines liés en particulier au changement décrit cinq étapes : déni, colère, négociation, dépression, acceptation. Comme je l’ai indiqué dans le corps de l’article, il s’agit de changements imposés par des événements extérieurs, non délibérément décidés.
– Sur le point de bascule : en coaching systémique, le changement est parfois décrit comme un point de bascule “edge” . Il existe de multiples moyens pour passer du versant avec lequel on est familier à l’autre. Une des notions de base est qu’il existe une sagesse inhérente au fait d’explorer “l’autre coté”.
– Sur la vision et l’écoute : Otto Scharmer, professeur au MIT et auteur de multiples ouvrages sur la Théorie U. Il a aussi lancé le concept de Ulabs qui permettent de redéfinir la manière dont nous percevons la réalité, de nous ancrer dans notre potentiel de l’instant présent et de co-créer des futurs résiliants.
– Sur le fait que notre environnement est occupé dans sa quasi-totalité par le système encore en place : Matrix en est une excellente métaphore (sinon le film n’aurait pas eu autant de succès).
– Sur les tentatives qui ont échouées : Dans mon travail de consultant, je suis parfois amené à demander à ceux qui tombent dans le piège de “on a essayé et ça n’a pas marché”, s’ils ont des enfants. Ensuite, je leur demande ce qui se serait passé si, quand leur enfant a appris à marcher, au bout de dix tentatives infructueuses pour se tenir debout, ils lui auraient dit “tu n’y arrives pas, laisses tomber, tu n’as qu’à continuer à ramper.” Il faut souvent se poser la question de ce que le système “veut” faire émerger.